SC. 2021 – « Une trajectoire de formation non linéaire  » par Isabela Otechar Barbosa

En préparation de la Section clinique 2021 d’Aix-Marseille qui a pour thème « clinique de l’urgence », Isabela Otechar Barbosa, participante à la Section clinique d’Aix-Marseille, étudiante en Master 2 de psychanalyse à l’Université Paris 8, témoigne du désir et de la nécessité de formation orientée par la psychanalyse par un texte intitulé « Une trajectoire de formation non linéaire ».

La pratique de la psychanalyse ne préconise aucun mode d’emploi. La psychanalyse est bien une expérience du nouveau, de ce qui se fait pour chaque cas, à chaque pas. Que peut être une formation orientée par la psychanalyse dans un monde où l’information circule toujours plus vite et où la demande est centrée sur une formation rapide ? Celle-ci se différencie notamment d’autres pratiques qui opèrent à partir d’un savoir saisissable. A contrario, la formation de la Section clinique constitue selon moi une rupture avec un savoir connu. Elle s’ancre dans notre propre trajectoire d’analysant et de sa pratique clinique à partir de notre propre désir.

Au début de ma trajectoire, je me demandais toujours : comment opérer dans la clinique et recevoir un sujet à partir de l’orientation analytique ? Je reconnaissais qu’il fallait un pas de plus pour comprendre en quoi elle se différenciait des autres approches. À l’université, lors de ma formation comme psychologue, je cherchais des pistes cliniques opérantes avec cette orientation que je choisissais. Au fur et à mesure que je recherchais un savoir, je me suis rendue compte dans ma propre expérience d’analyse et dans la pratique qu’il s’agissait de laisser une place au non-savoir.

La découverte qu’il n’y a pas un savoir préalable, une norme, est centrale dans mon désir de formation. Le mode d’emploi n’existe pas. S’orienter de l’éthique de la psychanalyse et de sa formation, c’est faire vaciller la certitude, mettre en question le doute et interroger un savoir absolu qui n’existe pas. Ce qui est essentiel n’est pas de l’ordre de l’apprentissage ou de la compréhension, de ce que l’on a rencontré en tant qu’analysant à partir du « dire-vent analytique [1] ». C’est un savoir qui relève de la singularité de chaque sujet.

 Mon désir de formation est centré autour de l’accueil du non-savoir, en laissant place aux trébuchements rencontrés, entre déconstruction d’un savoir saisissable et construction d’un nouveau savoir d’un autre ordre. Ce cheminement vient à la fois de mon expérience d’analyse, de mon travail de recherche en master de psychanalyse à l’Université Paris VIII et de la rencontre avec un espace de formation comme la Section Clinique.

Comme participante à la Section Clinique d’Aix Marseille, j’ai pu poser mes interrogations cliniques. Lors des groupes d’élucidation de cas, des présentations cliniques et des séminaires théoriques, la rencontre avec les enseignants et les autres participants est essentielle à l’élaboration d’un savoir singulier. Un lieu de formation offre un espace dans lequel l’écoute de la singularité du cas est partagée par l’ensemble des participants. Ce qui est dit, écouté et partagé résonne dans notre désir de formation et notre pratique en permettant d’avancer selon une trajectoire qui n’est pas linéaire, mais riche de courbes et de dénivelés.

N’étant pas linéaire, la trajectoire de formation orientée par la psychanalyse ne peut être pensée que dans une voie « hors de tout idéal et de la norme[2] ». C’est cette question qui est mise en avant par Jacques Alain Miller dans son cours « Le désenchantement de la psychanalyse » quand il parle de la difficulté à concevoir la formation analytique. Selon lui, « elle est si difficile à déterminer puisqu’il faut désormais penser la formation hors de tout idéal et de la norme. Et donc que la formation tend à être saisie comme la communication d’un style de vie plutôt que comme accéder à réaliser un idéal[3] ».

Une formation comme indique Jacques Alain Miller se montre nécessaire à la pratique clinique car ce qui est mis en avant n’est pas un sujet qui sait, mais plutôt un sujet qui trébuche, un sujet qui manque, et encore, un sujet divisé qui se trompe. Un participant qui ne recherche plus un savoir absolu est celui(celle) qui peut, dans sa trajectoire de formation et de pratique à la Section clinique, opérer avec les cas d’urgence rencontrés dans la praxis.

[1]      Jacques Lacan, « Ouverture à la section clinique », Ornicar, n 9, 1977, p. 7.

[2]      Ibid.

[3]      Jacques Alain Miller, « Le désenchantement de la psychanalyse », Cours L’Orientation lacanienne III, 4 du 18 22/05/2002 », La cause Freudienne, 2002, p. 251. Séminaire disponible en ligne à l’adresse : http://jonathanleroy.be/2016/02/orientation-lacanienne-jacques-alain-miller/ 

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